

Par Abdirezak Sahane Elmi
Ancien fonctionnaire du gouvernement et analyste géopolitique
Introduction
L’histoire du Nil est, en vérité, l’histoire du cadeau naturel de l’Éthiopie à l’Afrique. Pendant des siècles, ce grand fleuve a coulé depuis les hauts plateaux éthiopiens, alimentant des millions de personnes en aval, sans plainte, sans revendication et sans reconnaissance. Pourtant, aujourd’hui, la nation même qui donne vie au Nil est injustement accusée de l’avoir volé.
L’aspiration de l’Éthiopie à utiliser ses propres eaux pour l’énergie, l’alimentation et le développement n’est pas une agression ; c’est une justice longtemps retardée. C’est le droit d’une fière nation africaine de s’élever selon ses propres conditions, sans reliques coloniales ni intimidations extérieures. La construction du Grand barrage de la Renaissance éthiopienne (GERD) ne constitue pas une menace pour la survie de qui que ce soit, c’est un symbole de l’autonomie et de la dignité de l’Afrique. Mais l’Égypte, s’appuyant sur des traités dépassés datant de l’époque coloniale, continue de présenter l’Éthiopie comme l’agresseur. Et derrière le récit du Caire se cache un allié encore plus dangereux : Donald Trumpdont les déclarations imprudentes et les positions de politique étrangère ont enhardi l’ambition expansionniste de l’Égypte sous le prétexte des « droits sur l’eau du Nil ».
Cet article expose cette manipulation, comment l’alignement de Trump avec l’Égypte sert des objectifs géopolitiques plus larges liés à la sécurité d’Israël, comment le Caire utilise le Nil comme arme politique et pourquoi le La Corne de l’Afrique doit rester unie derrière la cause légitime de l’Éthiopie. Parce que le Nil, tout comme la justice, ne peut pas couler éternellement à l’ombre du contrôle colonial.
La naissance coloniale des « droits » égyptiens
Les traités qui excluaient les vrais propriétaires
L’argument de l’Égypte sur le Nil ne repose pas sur l’équité, mais sur l’injustice de l’histoire. Deux traités de l’époque coloniale constituent le fondement de sa revendication :
• Le Traité anglo-égyptien de 1929conçu par la Grande-Bretagne, a donné à l’Égypte un droit de veto sur tout projet sur le Nil. L’Éthiopie, véritable source de la majeure partie du Nil, n’a jamais été invitée à cette table.
• Le Accord Égypte-Soudan de 1959 a suivi le même schéma, divisant le fleuve entre Le Caire et Khartoum comme si les autres nations du bassin du Nil n’existaient pas.
Tous deux étaient des instruments de privilèges coloniaux et non de justice internationale. Ils ont réduit au silence les nations en amont, notamment l’Éthiopie, qui fournit plus de 85% des eaux du Nil à travers les rivières Nil Bleu, Tekeze et Sobat.
(QZ Africa : « Comment la Grande-Bretagne a donné à l’Égypte le contrôle du Nil »)
L’Éthiopie n’a jamais signé, accepté ou reconnu ces traités. Ce sont des reliques de l’arrogance impériale, des documents morts qui appartiennent aux musées et non à la diplomatie du XXIe siècle.
(Addis Standard : « Le droit de l’Éthiopie au Nil : une défense de la souveraineté »)
Le droit juridique et moral de l’Éthiopie:
L’argument de l’Éthiopie est simple et juste : une nation a le droit d’utiliser ses ressources naturelles pour le développement de sa population. Le Nil Bleu commence en Éthiopie; 85% de l’eau du Nil provient des précipitations éthiopiennes. Il est absurde, voire immoral, qu’on dise depuis des décennies à un pays contribuant à la quasi-totalité du flux de ne pas y toucher une goutte.
(Opinion d’Al Jazeera : « Le Nil ne peut pas être gouverné par des traités coloniaux »)
Le droit international soutient la position de l’Éthiopie. Les principes de utilisation équitable et raisonnable, pas de préjudice significatifet coopération constituent le fondement moderne de la gouvernance des rivières transfrontalières. Celles-ci sont inscrites dans le Convention des Nations Unies sur le droit relatif aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation (1997) et le Accord-cadre de coopération (CFA) du bassin du Nil, entré en vigueur en 2024.
(Blog sur le droit international de l’eau : « L’accord-cadre de coopération sur le bassin du Nil entre en vigueur »)
En termes simples : les revendications coloniales ne peuvent pas l’emporter sur le droit moderne, et l’injustice ne peut pas devenir un héritage.
Pourquoi la revendication de l’Éthiopie est valable sur tous les terrains
| Aspect | La revendication de l’Égypte | La revendication de l’Éthiopie |
| Base juridique | Traités coloniaux (1929, 1959) excluant les États d’amont. | Un droit international moderne qui met l’accent sur l’utilisation équitable et le partage équitable. |
| Fondement moral | Récit historique de contrôle et de dépendance. | Droit de se développer, de produire de l’énergie et de sortir des millions de personnes de la pauvreté. |
| Fait hydrologique | Reçoit l’eau de l’amont. | Fournit plus de 85 % du débit total du Nil. |
| Un précédent mondial | Dépassé et unilatéral. | Soutenu par les conventions des Nations Unies et les initiatives du bassin du Nil. |
Il ne reste plus aucun fondement moral ou juridique au monopole égyptien. La cause de l’Éthiopie n’est pas seulement légitime, elle est juste. Refuser à l’Éthiopie le droit au développement revient à refuser à son peuple le droit de vivre dans la dignité.
Le rôle de Trump : la politique déguisée en médiation
L’implication de Donald Trump dans le conflit du Nil n’était pas une question de paix. Il s’agissait de politique de pouvoir. Dans octobre 2020il a tristement déclaré que « l’Égypte finira par faire sauter le barrage ».
(DW : « L’Éthiopie accuse Trump d’inciter à la guerre sur le barrage du Nil »)
Ce n’était pas de la diplomatie, c’était une invitation imprudente à la guerre. Ses déclarations ont enhardi les partisans de la ligne dure au Caire et insulté la souveraineté de l’Éthiopie.
Dans juillet 2025Trump a répété le même parti pris :
« Si j’étais l’Égypte, je voudrais de l’eau dans le Nil… Ils ont construit un barrage en Éthiopie qui empêche l’eau de couler, ce qui pose un petit problème à l’Égypte. »
(The National News : « Trump déclare que le conflit égyptien sur le Nil sera résolu « très rapidement » »)
Trump a réduit l’aide à l’Éthiopie, a faussement affirmé que les États-Unis avaient financé le barrage et s’est aligné publiquement sur la position de l’Égypte.
L’Égypte, à son tour, a récompensé son parti pris. Le Caire a annoncé son intention d’honorer Trump avec une « Prix du Nil »le remerciant symboliquement de soutenir leur « droit » au fleuve. C’était un théâtre politique de gratitude – récompensant un homme qui parlait pour eux, pas pour la justice.
(L’Egypte aujourd’hui : « Trump dit qu’il a évité la guerre entre l’Égypte et l’Éthiopie »)
Le projet plus vaste : déstabiliser la Corne de l’Afrique:
La posture de Trump s’inscrit dans un schéma plus vaste et plus dangereux. L’Égypte, alignée sur Le régime autocratique de l’Érythréetravaille sans relâche pour déstabiliser l’Éthiopie, la Somalie, le Soudan et même le Soudan du Sud. Ce n’est pas de la paranoïa ; c’est une preuve géopolitique. L’alliance du Caire avec Asmara et son programme anti-éthiopien sont une intention délibérée visant à affaiblir la paix et le progrès dans la région.
En revanche, les Émirats arabes unis (EAU) a maintenu une partenariat constructif et de développement avec l’Éthiopiesoutenant la stabilité régionale, la croissance des infrastructures et les projets économiques coopératifs. Ce partenariat s’oppose catégoriquement à la stratégie de division de l’Égypte et aux provocations irresponsables de l’Érythrée.
L’Égypte est également un allié de longue date des États-Unis et d’Israël. Sous Trump, le lien s’est approfondi. L’Égypte a joué un rôle silencieux dans la défense du blocus israélien de Gaza, a fermé ses frontières aux Palestiniens désespérés et a agi comme un partenaire de sécurité pratique de Washington dans la région.
(Al Jazeera : « Le rôle de l’Égypte à Gaza sous surveillance »)
La politique étrangère de Trump au Moyen-Orient – armer l’Égypte, récompenser son armée et glorifier son contrôle autoritaire – n’a jamais été axée sur la paix. Il s’agissait de protéger les intérêts d’Israël et de maintenir l’influence américaine au Caire.
(The Guardian : « L’héritage de Trump au Moyen-Orient : des alliances fondées sur les armes et la peur ») La question du Nil s’inscrit parfaitement dans cette stratégie. En soutenant les affirmations de l’Égypte, Trump mine simultanément l’essor de l’Éthiopie et maintient la Corne de l’Afrique divisée et instable – une région qu’il a un jour qualifiée de « problématique ».
La victoire de l’Éthiopie dans tous les sens
Sous n’importe quel angle, juridique, moral, scientifique et humainla position de l’Éthiopie est gagnante.
• Il s’appuie sur la loi : utilisation équitable, partage équitable et droits souverains.
• Il repose sur la moralité : une nation pauvre utilisant ses ressources pour lutter contre la pauvreté.
• Il repose sur l’hydrologie : source de 85% du débit d’eau.
• Il repose sur un principe : rejeter la servitude coloniale.
La revendication de l’Égypte repose sur l’injustice de l’histoire. Le soutien de Trump repose sur une tromperie politique. Ni l’un ni l’autre ne peut durer.
Conclusion : Défendre les droits de la Corne avec unité
Les Éthiopiens et les peuples de la Corne de l’Afrique doivent comprendre qu’il ne s’agit pas uniquement du combat de l’Éthiopie. Il s’agit d’une lutte contre l’ancien ordre colonial qui est rebaptisé par la diplomatie moderne. Les mêmes mains qui divisaient autrefois l’Afrique tentent à nouveau, en utilisant l’aide, la rhétorique et la manipulation.
Le Nil appartient à tous ceux qui le partagent, et non à un seul État. La cause de l’Éthiopie est juste, légale et morale. La Corne de l’Afrique doit être solidaire : Éthiopiens, Somaliens, Soudanais, Djiboutiens, Sud-Soudanais et le peuple érythréenqui doivent enfin se lever pour se libérer de la poigne de fer du dictateur qui a emprisonné toute une nation et lui a volé son avenir.
Les Érythréens méritent la démocratie et la paix, et non un militarisme sans fin. Leur libération fait partie de la libération plus large de la Corne de l’Afrique, de la tyrannie, de la domination étrangère et de l’exploitation.
Parce que quand l’Éthiopie se relève dignement, la Corne entière s’élève avec elleet aucun mensonge colonial, aucune tromperie de l’ère Trump et aucune dictature imprudente ne peuvent noyer cette vérité.
Note de l’éditeur : les opinions exprimées dans l’article ne reflètent pas nécessairement celles de Togolais.info.
__
À soumettre Communiqué de presseenvoyez la soumission à info@Togolais.info



Parly apprend comment Nkabinde a perdu son emploi à l’IPID après des disputes avec son ancien patron McBride