Le président Hassan Sheikh et le Premier ministre Abiy

Maria

Abiy Ahmed et Hassan Sheik Mohammed à Addis-Abeba (Photo : PD)

Par Mohamud A. Ahmed – Cagaweyne

Une région au bord du gouffre : le leadership dans la tourmente

L’auteur (archives)

Alors que la poussière de l’histoire retombe, la Somalie se trouve à la croisée des chemins précaire. La présidence de Hassan Sheikh Mohamud, autrefois présentée comme une lueur d’espoir pour l’unité et la réforme, est désormais le spectacle de crises politiques en cours. Les experts et les diplomates, tant régionaux qu’internationaux, restent perplexes face à la danse complexe des luttes de pouvoir qui définissent l’arène politique somalienne. Le mandat de Hassan Sheikh, semé de défiance interne, de rivalités géopolitiques et de fragilité institutionnelle, est devenu un test décisif pour l’avenir de la Somalie.

Du défi du Puntland et du Jubaland aux manœuvres géopolitiques de l’Égypte, de l’Éthiopie et de l’Érythrée, la Somalie est devenue le point central d’une compétition régionale aux enjeux élevés. Dans le même temps, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, dont la politique étrangère a autrefois échoué sous le poids des faux pas, est réapparu comme une force diplomatique dans la Corne. Les deux dirigeants incarnent, pour le meilleur ou pour le pire, la dynamique complexe d’une région en contradiction avec elle-même.

Une image vaut mille mots : des sourires au milieu des tensions

Une photographie peut capturer l’essence d’un moment, distillant des émotions complexes et des récits superposés dans une seule image. Lors de la récente visite du président somalien Hassan Sheikh Mohamud à Addis-Abeba, une image largement diffusée de lui souriant largement aux côtés du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed résumait le drame de la réunion.

Le sourire, radieux et débridé, était plus qu’une démonstration de chaleur : c’était un message. Pour ceux qui ont vu l’image, elle semblait dire : « Nous sommes frères ». Pourtant, derrière cette expression de camaraderie se cachait un réseau de tensions géopolitiques, de griefs historiques et de rivalités tacites qui ne pouvaient être masqués par de seuls gestes.

Une nation distraite : le répit d’Al-Shabaab au milieu du chaos politique

Alors que la Somalie est aux prises avec des conflits politiques internes, Al-Shabaab – une menace permanente pour la stabilité du pays – semble avoir obtenu un sursis involontaire. L’administration du président Hassan Sheikh Mohamud a réorienté ses efforts vers la gestion d’une structure fédérale fracturée et la consolidation de sa position politique, laissant les efforts de lutte contre le terrorisme apparemment dépriorisés.

Alors que les premières campagnes militaires de Hassan Sheikh contre Al-Shabaab ont pris de l’ampleur, le groupe a résisté à la pression et a poursuivi son insurrection, exploitant les distractions politiques de la Somalie. Les analystes suggèrent que le groupe profite lorsque les gouvernements fédéral et étatiques restent en désaccord, car la désunion affaiblit la capacité de la nation à agir de manière coordonnée.

Les piliers fragiles : le Puntland, le Jubaland et l’effondrement du gouvernement fédéral

La structure fédérale de la Somalie, conçue pour répartir le pouvoir et favoriser l’unité, s’effondre. Le Puntland et le Jubaland, deux régions semi-autonomes, sont devenus des symboles de défi à l’égard de la centralisation perçue à Mogadiscio. Leurs griefs – allant de l’allocation des ressources à la marginalisation politique – ont révélé les fissures du cadre de gouvernance de la Somalie.

Sans dialogue et compromis significatifs, la vision fédérale risque de s’effondrer. L’incapacité de Hassan Sheikh à intégrer ces régions a laissé son administration vulnérable à la fragmentation. Les critiques affirment que sa présidence perd la confiance des principales parties prenantes, accélérant ainsi la descente de la nation vers la division.

L’échiquier de la Corne : les agendas concurrents de l’Égypte, de l’Éthiopie et de l’Érythrée

La fragilité interne de la Somalie a créé un vide que les puissances régionales souhaitent combler. L’Égypte, l’Éthiopie et l’Érythrée ont transformé la Somalie en un échiquier géopolitique, chacun faisant avancer son propre agenda. L’Égypte, motivée par ses préoccupations existentielles concernant le Nil, a renforcé ses liens militaires avec la Somalie. L’Éthiopie, cherchant à reconquérir son influence, a repris contact avec Mogadiscio et s’est positionnée comme une force stabilisatrice au sein de la Mission de stabilisation de l’Union africaine en Somalie (AUSOM).

L’Érythrée, toujours opportuniste, manœuvre subtilement, s’alignant là où elle voit un avantage stratégique. Pour Hassan Sheikh, ces intérêts concurrents constituent une arme à double tranchant, offrant des ressources et des alliances mais menaçant également la souveraineté de la Somalie.

Accord d’Ankara : un tournant diplomatique pour Abiy Ahmed

Le Premier ministre Abiy Ahmed, dont la position diplomatique a souffert des conflits internes et des tensions régionales en Éthiopie, a trouvé la rédemption dans l’accord d’Ankara. L’accord négocié par la Turquie a contribué à dégeler les relations entre l’Éthiopie et la Somalie après des années de méfiance. Même s’il ne s’agit pas d’une panacée, cela a marqué un changement dans la politique étrangère de l’Éthiopie, signalant une évolution vers la coopération plutôt que la confrontation.

L’accord d’Ankara a permis à Abiy de réaffirmer l’importance de l’Éthiopie dans la Corne, positionnant Addis-Abeba comme un acteur clé dans les efforts de stabilisation de la Somalie. Ce changement reflète un nouveau pragmatisme dans l’approche d’Abiy, bien loin des échecs diplomatiques du passé.

Addis-Abeba et Le Caire : un choc d’agendas concurrents

La rivalité entre l’Éthiopie et l’Égypte est un microcosme des tensions plus larges dans la Corne. Les deux pays cherchent à exercer une influence en Somalie, mais leurs intérêts contradictoires menacent de saper les efforts de stabilité. La présence militaire croissante de l’Égypte en Somalie, associée à ses efforts pour obtenir le leadership de l’AUSOM, a sonné l’alarme à Addis-Abeba.

Pour la Somalie, équilibrer ces deux pouvoirs est un acte délicat. La récente visite de Hassan Sheikh à Addis-Abeba, marquée par une chaleur manifeste entre lui et Abiy, a marqué un alignement stratégique. Mais ce rapprochement risque de s’aliéner Le Caire, qui considère l’Éthiopie comme son principal rival dans la région.

Le retour stratégique d’Abiy Ahmed : le crédit là où il est dû

Comme le disent les Somaliens, dil gaalka gartiisana sii– punissez votre adversaire mais rendez-lui justice. Malgré tous ses défauts, le Dr Abiy Ahmed mérite le mérite d’avoir recalibré la politique étrangère de l’Éthiopie. Son engagement en Somalie, sa participation à l’AUSOM et ses relations améliorées avec Mogadiscio reflètent une maturité stratégique qui manquait les années précédentes.

Comparées aux échecs diplomatiques de l’année dernière, les récentes initiatives d’Abiy démontrent une vision claire du rôle de l’Éthiopie dans la Corne de l’Afrique. En équilibrant les alliances régionales et en répondant aux griefs du passé, il a positionné l’Éthiopie comme un partenaire crédible dans la stabilisation de la Somalie.

Le cauchemar de Hassan Sheikh : fragmentation interne et isolement diplomatique

Alors qu’Abiy Ahmed trace la voie de la rédemption, Hassan Sheikh fait face à un scénario cauchemardesque. Le défi du Puntland et du Jubaland, associé au scepticisme croissant des politiciens somaliens, a gravement blessé sa présidence. Beaucoup pensent que la structure fédérale est sur le point de s’effondrer et que Hassan Sheikh ne dispose pas du capital politique nécessaire pour inverser la tendance.

Les critiques affirment que l’accent mis par son administration sur les alliances extérieures s’est fait au détriment de la cohésion interne. Si le Puntland et le Jubaland ne sont pas réintégrés dans le giron, la Somalie risque de sombrer dans une nouvelle ère de fragmentation, laissant la présidence de Hassan Sheikh comme un récit édifiant d’opportunités manquées.

L’AUSOM comme théâtre de rivalité : la Somalie dans un bras de fer diplomatique

La Mission de l’Union africaine pour la stabilisation en Somalie (AUSOM) a été conçue comme une plateforme de paix, mais elle est devenue un champ de bataille entre des intérêts concurrents. L’Égypte, l’Éthiopie et l’Érythrée considèrent la mission comme un moyen de faire avancer leurs programmes régionaux, souvent aux dépens de la souveraineté de la Somalie.

Pour Hassan Sheikh, assurer le succès de l’AUSOM nécessite de gérer ces rivalités avec tact et détermination. Ne pas le faire risque de transformer la mission en un outil de division plutôt qu’en une force d’unité.

La crise de confiance : une vision fédérale en ruine

Le système fédéral somalien, autrefois symbole d’espoir, semble désormais s’effondrer. Les politiciens et les analystes considèrent le leadership de Hassan Sheikh comme inefficace pour relever les défis les plus urgents du pays. Alors que le Puntland et le Jubaland s’éloignent de Mogadiscio, nombreux sont ceux qui craignent que la Somalie soit au bord de l’implosion politique.

La concurrence entre puissances régionales ne fait qu’exacerber cette fragilité. Alors que la Somalie devient le théâtre de rivalités extérieures, le gouvernement fédéral risque de perdre le contrôle, laissant la nation vulnérable à la division et à l’exploitation.

La voie à suivre : la rédemption ou la ruine dans la Corne

Le destin de Hassan Sheikh Mohamud et d’Abiy Ahmed est étroitement lié à l’avenir de la Corne de l’Afrique. Pour Hassan Sheikh, la voie de la rédemption consiste à rétablir la confiance avec les États fédéraux, à affirmer la souveraineté de la Somalie et à favoriser l’unité face aux pressions extérieures.

Pour Abiy Ahmed, sa résurgence diplomatique doit être soutenue par un engagement constant et un engagement en faveur de la stabilité régionale. Même si les deux dirigeants sont confrontés à des défis importants, leurs actions dans les mois à venir façonneront la trajectoire de la Corne pour les années à venir.

Les enjeux sont élevés et le temps presse. La question demeure : Hassan Sheikh pourra-t-il sauver sa présidence, ou la fragile vision fédérale de la Somalie s’effondrera-t-elle sous le poids de ses contradictions ? Seul le temps nous le dira, mais le monde suit de près la Corne de l’Afrique qui se trouve à l’aube d’une transformation ou d’une tragédie.

L’écrivain est joignable au : +251900644648

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Note de l’éditeur : les opinions exprimées dans l’article ne reflètent pas nécessairement celles de Togolais.info

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