L’Afrique sera confrontée à un fardeau du service de la dette de 74 milliards de dollars en 2024, prévient la BAD

Maria

L’Afrique sera confrontée à un fardeau du service de la dette de 74 milliards de dollars en 2024, prévient la BAD

Les pays africains auront besoin de 74 milliards de dollars en 2024 pour faire face à leurs obligations en matière de dette, soit une forte augmentation par rapport aux 17 milliards de dollars de 2010, selon le professeur Kevin Urama, économiste en chef et vice-président pour la gouvernance économique et la gestion des connaissances à la Banque africaine de développement (BAD).

Le professeur Urama a fait cette révélation lors du lancement du Forum sur la gestion de la dette pour l’Afrique (DeMFA) à Abuja le lundi 16 décembre 2024.

Le forum, intitulé « Faire fonctionner la dette pour l’Afrique : politiques, pratiques et options », a réuni les principaux décideurs politiques et parties prenantes pour discuter de la crise croissante de la dette du continent. Urama a souligné que plus de la moitié des coûts du service de la dette africaine – environ 40 milliards de dollars – sont dus à des créanciers privés, ce qui reflète une dépendance croissante à l’égard des marchés de capitaux privés.

Il a exprimé son inquiétude quant à la viabilité du fardeau de la dette de l’Afrique, notant que 20 pays africains sont soit en surendettement, soit courent un risque élevé de le devenir, avec des risques de refinancement croissants en raison de remboursements massifs. Urama a en outre averti que le chiffre annoncé du service de la dette de 74 milliards de dollars pourrait être une sous-estimation, soulignant des dettes cachées et des passifs éventuels qui aggravent la pression financière.

« Les pays développés peuvent gérer des niveaux de dette élevés avec de faibles charges de service, tandis que les pays africains consacrent une proportion toujours croissante de leurs ressources budgétaires au remboursement de la dette », a déclaré Urama. Il a critiqué les mécanismes mondiaux d’allégement de la dette, les qualifiant de lents et inefficaces, incapables de résoudre les problèmes structurels sous-jacents qui compromettent la viabilité de la dette de l’Afrique. La BAD prévoit que les besoins annuels de refinancement de la dette des pays africains atteindront 10 milliards de dollars entre 2025 et 2033.

Le coût des emprunts pour les pays africains a également considérablement augmenté. En 2023, les rendements des euro-obligations africaines ont grimpé à 15 %, soit plus du double de la moyenne de 7 % observée en 2019. Urama a identifié la « prime de risque africaine », un surcoût annuel estimé à 24 milliards de dollars en raison d’une perception exagérée du risque, comme un facteur clé contribuant à les défis de la dette du continent.

Le forum a également mis en lumière le changement climatique comme facteur majeur de l’augmentation de la dette. Le Dr Anthony Simpasa, directeur du Département de politique macroéconomique, de prévision et de recherche de la BAD, a noté que de nombreux pays africains, en particulier ceux vulnérables aux chocs climatiques, ont dû emprunter massivement pour financer des projets liés au climat, en particulier pour l’adaptation et l’atténuation.

Mme Allison Holland, directrice adjointe du Département de stratégie, de politique et d’examen du Fonds monétaire international (FMI), a souligné l’importance de donner la priorité à la résolution de la dette du secteur privé. Elle a remis en question l’efficacité de l’implication des créanciers du secteur public avant les créanciers du secteur privé, notant que les interventions du FMI dépendent souvent de la volonté des créanciers officiels de participer.

L’événement a souligné l’urgence d’adopter des solutions globales à la crise de la dette en Afrique. Il s’agit notamment de repenser les modèles d’emprunt, d’améliorer les systèmes financiers mondiaux et d’investir dans la résilience économique du continent. Le professeur Urama a conclu en soulignant la nécessité de réformes structurelles et d’une coopération internationale renforcée pour s’attaquer aux causes profondes du fardeau croissant de la dette de l’Afrique.