La taxe sur l’inflation expliquée (Teshome Abebe)

Maria

Par Teshome Abebe

Un « aide-mémoire »

En tant qu’entrepreneurs, consommateurs et décideurs politiques, il est essentiel de comprendre que l’inflation agit comme une taxe cachée sur les consommateurs. Cette taxe sur l’inflation réduit effectivement le pouvoir d’achat de l’argent (revenu), et l’une des façons les plus courantes de la quantifier est de la relier à la variation de l’indice des prix à la consommation (IPC). L’approximation la plus simple et la plus directe de ce phénomène est la suivante :

Taxe d’inflation = Gamma/( 1 + Gamma )

où = l’inflation annuelle de l’IPC ; IPC = l’indice des prix à la consommation.

Cela fournit une représentation mathématique claire de la manière dont l’inflation pèse sur le pouvoir d’achat réel.

L’expression représente l’inflation annuelle de l’IPC, qui mesure l’augmentation générale des prix à la consommation. Cette formule simple divise cette variation par (1 + ), montrant que la taxe d’inflation n’est pas seulement une augmentation linéaire ; elle est en fait atténuée par la croissance des prix déjà prise en compte. Voici pourquoi :

Revenu nominal et revenu réel : le revenu nominal des consommateurs peut augmenter en fonction de l’inflation, mais le revenu réel, ajusté en fonction de l’inflation, ne suit pas le rythme si l’IPC augmente. La taxe d’inflation correspond à la part du pouvoir d’achat des consommateurs qui s’érode en raison de la hausse des prix.

Comportement du consommateur : Si l’inflation entraîne une hausse des prix, disons de 10 %, = 0,10, le revenu réel des consommateurs est réduit d’une fraction déterminée par la formule. Et dans ce cas :

Taxe d’inflation = (0,10) / (1 + 0,10) = 9,09 %.

Cela signifie que même si l’inflation est de 10 %, l’effet réel sur le pouvoir d’achat des consommateurs est juste inférieur à ce chiffre, soit 9,09 %. L’intuition ici est que les consommateurs ne perdent pas 10 % de leur pouvoir d’achat car leur revenu nominal (s’il augmente) absorbe une partie du choc inflationniste.

Exemple dans les économies émergentes :

L’inflation a souvent un impact plus important sur les consommateurs des économies émergentes où les systèmes monétaires peuvent être moins stables. Prenons l’exemple d’un pays comme l’Argentine ou même l’Éthiopie, qui a connu des taux d’inflation élevés ces dernières années. Supposons que l’inflation sur un an soit de 25 % ( = 0,25). En appliquant la formule simple mais élégante de (1) ci-dessus :

Taxe d’inflation = / (1 + ) = 0,25 / (1 + 0,25) = 20 %.

Même si l’inflation est de 25 % dans l’exemple, la perte réelle de pouvoir d’achat du point de vue de l’impôt inflationniste est de 20 %. Cela montre que l’inflation est quelque peu atténuée par les augmentations de salaires ou les ajustements du revenu nominal. Cependant, dans les économies émergentes, les salaires baissent souvent pour augmenter suffisamment vite pour compenser l’inflation, ce qui signifie que le pouvoir d’achat réel chute fortement, les consommateurs les plus pauvres supportant le poids de cette taxe. En supposant que nous prenions le chiffre du gouvernement d’un taux d’inflation de 39 % en Éthiopie, l’exercice ci-dessus donne un impôt inflationniste de 28 % pour les Éthiopiens au cours de l’année écoulée (mes propres calculs sont basés sur une inflation de près de 70 %, soit un impôt inflationniste de 41 %).

Quel est l’impact de la taxe sur l’inflation sur le produit intérieur brut (PIB) ?

L’inflation affecte également le taux de croissance du PIB, en particulier dans les économies émergentes où une inflation élevée peut nuire gravement à la performance économique. Voici pourquoi :

Chute de la demande des consommateurs : l’inflation pèse sur le pouvoir d’achat et les consommateurs des économies émergentes dépensent moins. Leur pouvoir d’achat ayant diminué de 20 %, ils réduisent leurs achats de biens non essentiels, ce qui réduit la demande dans l’économie. La baisse de la demande entraîne un ralentissement de la croissance, voire une contraction du PIB.

Diminution des investissements : l’inflation crée de l’incertitude. Dans les économies émergentes, les entreprises sont moins disposées à investir lorsqu’elles ne peuvent pas prévoir les niveaux de prix futurs. La taxe sur l’inflation réduit leur rendement réel sur investissement, ce qui freine encore davantage la croissance économique.

Dépréciation de la monnaie : dans de nombreux pays émergents, l’inflation érode la valeur de la monnaie locale. Les banques centrales sont alors contraintes d’augmenter leurs taux d’intérêt pour défendre leur monnaie, ce qui réduit encore davantage la croissance économique à mesure que les coûts d’emprunt augmentent.

Une étude de cas réelle : le Zimbabwe

Le Zimbabwe a connu à la fin des années 2000 l’un des cas d’inflation les plus extrêmes, atteignant 89,7 sextillions de pour cent par mois. Dans ce scénario, la taxe sur l’inflation a été catastrophique, anéantissant pratiquement le pouvoir d’achat des consommateurs. Bien que l’hyperinflation soit un exemple extrême, elle illustre les dangers de la taxe sur l’inflation dans les marchés émergents. Même à un taux d’inflation plus modéré, la taxe sur l’inflation a des conséquences importantes sur la stabilité économique.

La taxe sur l’inflation, évoquée dans ce bref commentaire explicatif, est un outil puissant pour évaluer la perte réelle de pouvoir d’achat due à l’inflation. Son impact est particulièrement prononcé dans les économies émergentes, où l’inflation non seulement érode le pouvoir d’achat des consommateurs, mais freine également la croissance économique, freine l’investissement et conduit à l’instabilité monétaire. Les responsables politiques de ces économies doivent être parfaitement conscients de la taxe sur l’inflation et de ses implications plus larges sur l’économie. Il est essentiel de gérer l’inflation par le biais de politiques budgétaires et monétaires saines pour éviter qu’elle ne devienne une force destructrice pour la croissance et le développement.

Teshome Abebe, Ph.D. est un ancien prévôt et professeur d’économie

Note de l’éditeur : les opinions exprimées dans l’article ne reflètent pas nécessairement celles de Togolais.info

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