Confiscation d’actifs sans commune mesure avec la source de revenus connue

Maria

Éthiopie _ confiscation d'actifs Éthiopie _ confiscation d'actifs

Par Samuel Estéfanous

En tenant compte des exigences liées au dépôt d’une demande d’asile pratique et en y ajoutant des connotations politiques, on ne peut s’empêcher de sympathiser avec les politiciens de l’opposition qui ont fait défection en Norvège il y a quelques jours. Parmi les principales raisons invoquées pour expliquer cette défection, il y a le réseau de corruption quasi omnipotent au sein du gouvernement, capable de liquider quiconque ayant la moindre intention sincère de lui faire obstacle. Beaucoup sont devenus des victimes silencieuses et un nombre considérable de familles ont été poussées dans le précipice.

Ainsi, avec tout le potentiel d’être détourné à des fins autres que celles prévues, je crois sincèrement que la législation adoptée le 9 janvier 2025 visant à confisquer des actifs sans commune mesure avec la source de revenus connue d’une personne était attendue depuis longtemps.

Ce n’est pas si difficile de comprendre pourquoi. Sans trop s’attarder sur les études comparatives approfondies sur le sujet, nous pouvons justifier la législation sur les circonstances réelles du terrain ici dans le pays. En outre, cette loi particulière vise à s’attaquer aux gros poissons de la mer, les sales riches.

Lorsque le livre révélateur d’Ato Birhan Tsigab intitulé « La descente aux abysses de l’EPRDF » est sorti en 2019, il avait certainement donné un nouveau sens à la corruption dans un système de partis dominants. Je me souviens de l’animateur d’un talk-show populaire « benegerachin lay » s’exclamant avec incrédulité lors d’une interview avec Birhan.-‘êtes-vous en train de dire qu’il n’y a jamais eu de gouvernement au vrai sens du terme ces trois dernières décennies ? » La réponse de l’invité a été positive.

Soyons clairs en matière de corruption. Les membres de l’EPRDF sont irrécupérables et, de leur propre chef, ils sont tous présumés coupables jusqu’à preuve du contraire. La première proclamation de 2001 prévoyant des procédures spéciales et des règles de preuve pour enquêter et poursuivre les crimes de corruption émanait de ces circonstances sous-jacentes. L’inconvénient est qu’ils jugent le reste selon leurs propres critères. Malheureusement, les fonctionnaires corrompus ont un parrain divin de l’EPRDFite. Ils sont riches et capables de verser généreusement des pots-de-vin. Ils sont conseillés par une armée d’avocats et d’experts financiers de premier ordre possédant des « connaissances privilégiées ». Par conséquent, il y a peu de chances d’appréhender les véritables coupables. Au contraire, comme ces derniers sont des pros efficaces dans leur métier, ils renverseront la situation contre quiconque les menace et le feront « liquider ou réduire au silence ». Dans le pire des cas, la procédure spéciale et l’État de la preuve ont été utilisés à des fins politiques et le Parlement a été obligé de réviser la loi en 2005 et 2015.

D’une certaine manière, la dernière législation est un projet de loi de troisième génération dans la lutte contre la corruption et, en toute honnêteté, les Éthiopiens feraient bien de l’aider à porter des fruits tangibles. Les deux premiers ont été des échecs lamentables, à en juger par l’accord réduit accordé à la Commission au cours de l’année, même par le gouvernement. Le sort de cette législation serait prometteur si la Commission avait le courage de publier en parallèle les actifs enregistrés des agents publics.

À cet égard, ce qui ne cesse de m’étonner, c’est l’audace des meilleurs partisans de l’EPRDF (vous connaissez les MVP de la ligue de la corruption) pour défendre leurs richesses mal acquises. Vers 2018, l’un après l’autre, ils sont allés dans des programmes télévisés et ont répété une ligne d’une déclaration scénarisée :où sont les preuves ?

« Qu’en est-il des cinq immeubles à plusieurs étages que vous possédez et situés dans quatre villes différentes de la Région ? Un cadre a été appelé à rendre des comptes et sa réponse a été un classique de l’EPRDFite : « L’un que j’ai vendu depuis longtemps, l’autre est au nom de mon fils, un autre est enregistré au nom de ma femme, celui que vous continuez à élever est loué et le fait réel de le problème est que je vis dans la seule maison que je possède réellement-où est la preuve de ma corruption ? ‘ . Je veux dire, cela ne semblerait-il pas extrêmement hyperbolique, même pour un scénario de comédie ? Qui aurait pu le croire si quelqu’un comme Ato Birhan Tsigab ne l’avait pas écrit ?

Les frais de scolarité mensuels que l’on paie pour que ses enfants fréquentent une école coûteuse destinée à la communauté internationale dépassaient son salaire trimestriel brut total et on lui a demandé d’expliquer cette magie de l’économie domestique. Sans le moindre scrupule de conscience et avec des larmes scintillant dans ses yeux bienveillants, il jaillit quelque chose comme « Je ne pense pas avoir fait beaucoup de bien à ma communauté, mais l’amour et la gratitude exprimés en couvrant de si petites dépenses sont vraiment au-delà des mots qui pourraient expliquer. »

Ato Birhan Tsigab écrit qu’au Conseil de l’EPRDF, il était devenu pratique courante de dénoncer la corruption et de la combattre symboliquement avec la puissance combinée des hauts cadres présents. Cependant, personne n’était censé prendre cela au sérieux, sinon il serait expulsé de la Communauté sans ménagement. Des scouts seraient envoyés dans différents bureaux pour « photocopier » les documents compromettants. Dans la plupart des cas, comme un intronisé aussi naïf croit en son innocence, il essaie rarement de balayer ses erreurs sous le tapis. Il va donc sans dire que les « preuves » seraient omniprésentes pour l’inculper.

Contrairement au « rangement systématique des documents », il en parlait dans des correspondances officielles adressées à ses collègues et supérieurs. Après avoir obtenu ces documents, les pros convoqueraient une réunion d’urgence et brandiraient les papiers devant son visage…maintenant c’est une preuvecomme vous êtes propriétaire des erreurs de manière non sollicitée, nous n’avons pas besoin de corroboration !’ En peu de temps, la police et les procureurs fondraient sur lui comme un faucon poursuivant un pauvre lapin avec deux séries de griffes ouvertes et acérées et effrayantes.

D’ailleurs, comme la Commission serait à court d’affaires, elle se contenterait de traîner le pauvre garçon en prison avec l’accord exprès ou implicite du Front. Le fait qu’aucune perte financière n’ait été subie ne constituerait pas un moyen de défense. Le fait qu’il n’en ait profité ni à lui-même ni à un tiers ne lui servirait pas de prétexte pour échapper à la colère des puissants – du moins pas avant quatre ou cinq ans plus tard.

Il y a de fortes chances que personne n’ait de ses nouvelles pendant des années pendant qu’il pourrit en prison, même si dans certains cas, secrètement, ses riches camarades pourraient envoyer un message au propriétaire qui loue à sa famille un petit logement pour ne pas déranger la pauvre femme et les malheureux enfants exigeant louer. Si je ne me trompe pas, ce groupe de « perdants » (c’est ainsi qu’on les appelle parmi les riches corrompus et les glams) a fondé une organisation de la société civile après avoir été libéré – brisée et gaspillée. C’est dans ce contexte que la crainte éminente des membres des partis d’opposition qui ont fait défection semble crédible.

Selon Ato Birhan, à un moment donné, Ato Hailemariam était tellement irrité par la durée inhabituelle de la « dénonciation standard de la corruption » lors d’une réunion du Conseil qu’il avait craqué de manière inhabituelle : « Nous sommes tous ici ensemble, n’est-ce pas ? Nous savons tous que la plupart des chefs des réseaux de corruption se trouvent dans cette salle. La dernière fois que nous avons essayé d’enquêter, nous nous sommes tous cachés derrière nos nationalités respectives, n’est-ce pas ? Malheureusement, peu de choses semblent avoir changé depuis.

Avec une telle mauvaise gouvernance qui permet à la corruption de prospérer au plus haut niveau, on ne peut trouver aucune sorte de richesse substantielle dans le pays qui ne soit soutenue par un réseau de corruption. Quelques-uns de ceux qui avaient tenté de devenir légitimes se sont depuis longtemps épuisés avec une dette nette incroyable envers le MII. Cette culture a imprégné l’ensemble du système de gouvernance publique et d’entreprise selon laquelle, selon certains rapports, les jeunes demandeurs d’emploi ne peuvent pas concourir pour les postes vacants sans « huiler les paumes sèches ». En grande partie grâce à cette culture induite par l’EPRDF, un nouveau vocabulaire est entré dans le lexique amharique pour exprimer le fait de faire tout type d’affaires ou d’obtenir tout type de service dans le pays – ፍርቅ ማስያዝ. La corruption menace tous les tissus de la vie sociale et à moins que quelque chose d’aussi draconienne, à mesure que la dernière législation est mise en œuvre, à long terme, la société est certaine de prendre la loi entre ses mains en recherchant une redistribution équitable des richesses.

Ainsi, en toute honnêteté, s’en prendre à la véritable « richesse incommensurable » servira certainement le véritable objectif de la lutte contre la corruption si l’on prend toutes les précautions nécessaires pour ne pas permettre qu’elle soit détournée comme d’habitude.

Que Dieu bénisse.

L’écrivain peut être contacté à : estefanoussamuel@yahoo.com

Note de l’éditeur : les opinions exprimées dans l’article ne reflètent pas nécessairement celles de Togolais.info

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