Accord Éthiopie-Somalie : percée ou trahison ?

Maria

L’Éthiopie et la Somalie se réconcilient, mais le sort du protocole d’accord avec le Somaliland est incertain

Accord Ethiopie-Somalie : percée ou trahison ? Accord Ethiopie-Somalie : percée ou trahison ?

Toronto – L’Éthiopie est restée silencieuse sur la Déclaration d’Ankara, qui a mis fin à l’hostilité entre l’Éthiopie et la Somalie et ouvert la voie à des discussions sur la coopération, notamment sur l’accès à la mer. Aucune déclaration officielle n’a été publiée par le ministère éthiopien des Affaires étrangères.

Toutefois, dans une mise à jour hebdomadaire publiée vendredi, le ministère a qualifié les négociations menées sous médiation turque de « percée significative dans la résolution des malentendus entre les deux nations ».

Quelle est la cause de la tension entre l’Éthiopie et la Somalie ?

Le déclencheur immédiat des tensions entre l’Éthiopie et la Somalie a été le protocole d’accord signé avec le Somaliland le 1er janvier 2024. Bien que les détails du protocole d’accord restent confidentiels, le gouvernement éthiopien a annoncé qu’il « garantissait l’accès à la mer ». Les médias éthiopiens et somalilandais ont rapporté que le Somaliland accorderait à l’Éthiopie l’accès à 20 kilomètres de terres côtières dans le cadre d’un bail de cinquante ans en échange d’une reconnaissance en tant qu’État indépendant. Le Somaliland a déclaré son indépendance de la Somalie en 1991 et a depuis organisé cinq élections générales.

L’Éthiopie n’a pas encore clarifié le statut du protocole d’accord suite à la déclaration d’Ankara, signée mercredi. Le président turc Erdogan a été profondément impliqué dans les négociations, passant apparemment plus de sept heures dans la salle des négociations. « [You won’t leave this room until you reach a deal]», a déclaré Erdogan cité par Middle East Eye, soulignant l’importance qu’il attachait à cette question. La Turquie maintient une forte présence en Somalie, avec l’une de ses plus grandes bases militaires et des programmes de formation continus pour les soldats somaliens. Les investissements turcs en Somalie sont importants depuis 2011.

La Somalie a accusé l’Éthiopie de « violer sa souveraineté » en signant le protocole d’accord avec le Somaliland. Au cours des sept heures de négociations d’Ankara, Abiy Ahmed aurait résisté à s’engager en faveur de l’unité de la Somalie, suggérant un changement de position sur la reconnaissance du Somaliland. « Abiy était prêt à signer une déclaration dans laquelle il s’engageait en faveur de l’indépendance et de la souveraineté de la Somalie, [but] il a résisté à toute mention d’« intégrité territoriale » ou d’« unité » », a rapporté Middle East Eye, citant une source impliquée dans les négociations.

Réactions du Somaliland

Le Somaliland n’a pas encore commenté l’accord d’Ankara. Cela survient deux semaines après que le Somaliland a organisé avec succès une élection présidentielle, que l’Éthiopie a saluée comme étant « libre et équitable ». Cet éloge impliquait la reconnaissance du Somaliland en tant qu’État indépendant, malgré l’absence de reconnaissance formelle. Par ailleurs, l’Éthiopie a nommé en août un ambassadeur au Somaliland, suite à l’accord militaire entre la Somalie et l’Égypte.

Abdirahman Mohamed Abdullahi ‘Cirro’ et Mohamed Ali Aw Abdi ont prêté serment jeudi en tant que président et vice-président de la « République du Somaliland ». La nouvelle administration devrait revoir le protocole d’accord. Même si une éventuelle reconnaissance de la part de l’administration Trump pourrait réduire l’importance de la reconnaissance éthiopienne, la perspective de liens économiques avec l’Éthiopie reste vitale. La stabilité du Somaliland offre un environnement commercial attractif, en particulier pour les options portuaires alternatives pour le commerce éthiopien.

Colère en Somalie

Plusieurs sources font état d’une colère croissante en Somalie face à l’accord d’Ankara. La mission de maintien de la paix éthiopienne restera en Somalie après janvier 2025, malgré l’annonce antérieure de la Somalie selon laquelle les forces éthiopiennes seraient exclues de la nouvelle mission de maintien de la paix. L’engagement de la Somalie à fournir à l’Éthiopie un accès maritime pour le commerce est un autre point de discorde qui alimente la colère du public envers le gouvernement de Hassan Sheikh Mohamud.

Le sort de l’accord tripartite conclu entre la Somalie et l’Érythrée et l’Égypte en octobre 2024 est incertain à la suite de la déclaration d’Ankara. Cet accord incluait initialement l’Égypte dans la mission de maintien de la paix en Somalie et un accord bilatéral prévoyant le déploiement de 5 000 soldats égyptiens en Somalie, une décision à laquelle l’Éthiopie s’est opposée. On ne sait toujours pas si la Somalie a abandonné cet accord avec l’Égypte, mais l’accord avec l’Éthiopie suggère un changement potentiel dans les alliances militaires de la Somalie.

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